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Le prénom

Article du 30 juin 2014, publié par PO (modifié le 30 juin 2014 et consulté 152 fois).

Atelier d’écriture, 2012/13

Le prénom

Clarisse Thellier

++++

Jacquot, le mari

Son beau-père

Annabelle, l’épouse


Un couple dans un appartement. Jacquot lit son journal, une pipe à la bouche. Le téléphone sonne, Jacquot décroche.

JACQUOT — Allo, qui est-ce ?

BEAU-PÈRE (au téléphone) — Bonjour mon gendre ! Comment ça va ? A vrai dire, je ne veux pas savoir ! Je veux plutôt savoir comment va ma fille et son petit.

JACQUOT — Eh bien, ils vont plutôt bien. Vous voulez que je vous les passe ?

BEAU-PÈRE — Volontiers, merci.

Jacquot passe le téléphone à Annabelle.

BEAU-PÈRE — Allo ? Ma chérie ?

ANNABELLE (d’une voix fatiguée) — Oui, c’est moi ! Que se passe-t-il ?

BEAU-PÈRE — Waouh ! Tu as l’air en pleine forme, ma petite Annabelle ! Je voulais savoir comment vous alliez toi et mon petit fils !

ANNABELLE – Moi bof, mais lui il dort !

BEAU-PÈRE — Bien. Je m’excuse de ne pas être venu le jour de ton accouchement, j’avais un empêchement !

JACQUOT (s’interrompant dans la lecture de son journal) — Au fait, pourquoi il n’est pas venu ?

ANNABELLE (en s’adressant à son mari) — Il avait un empêchement !

JACQUOT — Naturellement, comme d’hab, quoi !

BEAU-PÈRE — Il dit quoi, le gros ?

JACQUOT — Le gros ? Moi, le gros ? Raccroche, chérie. Je ne sais pas comment elle fait pour le supporter, le vieux !

BEAU-PÈRE — Le vieux ? Moi, vieux ? Je ne sais pas, moi, comment elle fait pour le supporter, le gros !

ANNABELLE (au public) — Oh, ils me fatiguent ! Ils me fatiguent ! Je ne sais pas comment je fais pour les supporter, le gros et le vieux ! (Dans le téléphone) Bon, bref, qu’est-ce qu’il y a ? Pourquoi tu me déranges, mon petit père ? Hein ?

BEAU-PÈRE — Hé ho ! Calme-toi ! Moi, je prends des nouvelles ! Ça coute assez cher comme çà, la communication téléphonique ! 0.01 euro la minute, quand même !

ANNABELLE — Je vais t’en donner, moi, des nouvelles ! Franchement, tu nous appelles une fois par an et tu n’es même pas capable de payer 0.01 euro la minute alors que tu reviens d’un palace à New York ! Non mais je te jure ! Bon, qu’est-ce que tu veux à la fin ? Mais réponds, bon sang ! Réponds, avant que la communication ne soit trop chère !

BEAU-PÈRE — Oui, bon, je voulais savoir seulement comment s’appelle mon petit fils ! Histoire de savoir si le nom de ton mari, le Jacquot... Il fallait trouver, hein, Jacquot...! Bref savoir si le nom de ton mari avait influencé le nom de mon petit-fils !

JACQUOT (attitude zen) — Relax, Jacquot, relax, on respire, on inspire, on a l’habitude ! Chérie ? Dis-lui bien de boire un coup avant de connaître le nom parce qu’il va souffrir, le petit vieux !

BEAU-PÈRE — Oh là là, je m’attends au pire ! Je crains de mourir avant l’heure ! Attendez, j’appelle mon médecin ! Jean-Marie ! Préparez les cachets ! C’est bon, allez-y ! Je suis prêt !

JACQUOT — Prêt, t’es prêt ? Prêt à un arrêt cardiaque ? Ma chérie ? Dis adieu à ton pauvre père Il s’apprête à connaître le prénom de son petit-fils !

BEAU-PÈRE — Bon, dépêche-toi ! Plus tu parles, plus çà coute !

JACQUOT — Oui, j’en suis conscient ! Si la communication était gratuite, je ne ferais pas l’effort du siècle pour parler à mon beau père ! C’est déjà assez difficile comme çà ! Une femme de vingt kilos de plus et un gosse sur les bras !

ANNABELLE — Pardon ?

BEAU-PÈRE — Oh là là ! Ça tourne au vinaigre !

ANNABELLE — T’as dit quoi ? Mon Jacquot ? T’as dit quoi, là ? Répète un peu !

BEAU-PÈRE — Allez chérie, fais lui voir ton poing droit comme pour le précédent ! On va se marrer !

JACQUOT — J’ai dit que tu avais grossi et c’est vrai !

BEAU-PÈRE — Bon je vais vous laisse régler cette affaire entre vous ! Çà fait d déjà 3 euros 45 , je n’aurais pas assez d’argent pour acheter mes sardines, moi ! Salut !

ANNABELLE — C’est bon, il a raccroché, bien joué mon chéri ! Tu me trouves vraiment grosse ?

JACQUOT — Mais non mon amour, tu es plus belle que jamais ! Bon, alors comment on l’appelle le petit nouveau, hein ?

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